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Sans remise de Peine – Témoignages (2/2)

Libye (2019-2020)
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    Sans remise de peine - Témoignages (2/2)

A.M.

« J’ai 16 ou 17 ans, je ne suis plus sûr… j’ai quitté mon pays il y a trois ans. Pendant la traversée du Sahara, la voiture a eu un accident et je me suis fracturé le coccyx. Je me suis retrouvé captif aux mains d’un trafiquant. J’ai été battu quotidiennement pendant trois mois jusqu’à ce que ma famille paye la rançon. Ensuite, en rejoignant la mer, j’ai de nouveau été capturé et encore rançonné. Finalement, j’ai enfin pu prendre la mer… Après plus de 24 heures de trajet, nous avons croisé un navire italien qui nous a porté secours. Nous pensions aller en Italie, mais ils nous ont ramené en Libye, où nous avons été remis aux garde-côtes libyens.
Ici, nous n’avons aucune solution. Comment pouvons-nous sortir d’ici alors même que le HCR ne nous prête aucune attention ? Nous sommes désespérés, nous sommes, ici, sur le chemin de notre propre mort, alors qui peut nous aider ? Je suis un des plus jeunes ici, mais je reste assis comme les “vieux”. Je ne peux plus jouer, plus travailler, plus rien apprécier, je suis détenu ici… »
Février 2020

 

N.A.

« Je suis arrivé en Libye avec ma femme et notre enfant en octobre 2016, mais dans le désert nous avons été kidnappés et séparés. Après avoir payé sa rançon, ma femme a réussi à prendre la mer. En janvier 2017, elle a coulé. Elle a coulé avec notre enfant… À ce moment-là, j’ai vécu la plus grande tristesse qu’un homme peut vivre.
En aout 2017 j’ai payé pour prendre la mer, mais en fait nous (466 personnes) avons été vendus à un autre trafiquant. Nous étions environ 480 hommes et femmes entassés dans un entrepôt. En janvier 2018, à bout de patience des mauvais traitements quotidiens, nous nous sommes enfuis. J’ai fait partie d’un groupe de 48 personnes capturées, avant d’être revendu à deux reprises.
En mai 2018, après avoir payé la rançon et la traversée, nous avons pris la route vers la mer. En chemin, nous avons été environ 380 à être kidnappés. En juillet 2018 nous avons de nouveau payé et nous étions une soixantaine à prendre la mer. Après avoir navigué pendant environ 16 heures, nous sommes tombés en panne d’essence. Nous avons croisé un bateau italien qui ne s’est pas arrêté, puis quelques heures plus tard un bateau libyen nous a ramenés à terre. Nous avons été arrêtés et mis en centre de détention… Ce n’est pas la peine que je te décrive la vie ici parce que tu l’as vu par toi-même. Jusqu’à présent, les choses sont comme tu les vois… »
Février 2020

 

M.T.

« …Je suis parti de mon pays, l’Érythrée, en février 2017. J’ai été capturé et emprisonné à Suq Al-Khamis censé être un centre de détention officiel, mais après un mois et demi j’ai été transféré aux mains des trafiquants de Bani Walid. Là, J’ai été emprisonné pendant quatre mois dans le noir quasi total. Torturé jour après jour, avec mes six codétenus, cinq ont été tués sous mes yeux (deux d’entre eux par arme à feu et les trois autres suite à des chocs électriques répétés)… Il m’est difficile de trouver les mots pour décrire ce qui s’est passé. Ces quatre mois m’ont semblé quatre siècles ! (...) En Libye, j’ai été détenu plus de trois ans que ce soit par des trafiquants ou dans des centres de détention officiels. Je n’attends plus rien de personne, jour après jour je pleure à l’intérieur. »
Février 2020

 

M.A.

« J’ai été capturé avec beaucoup d’autres, par des trafiquants, dans le désert libyen. Nous avons été affamés, torturés, et j’ai vu des dizaines de personnes se faire tuer sous mes yeux. Aucune sépulture ne fut donnée à ces enfants, ces femmes et ces hommes tués, nos tortionnaires les ont juste jetés dans le feu… Par chance, après un mois, j’ai pu m’échapper avec quelques-uns de mes codétenus. J’ai rejoint la ville portuaire de Zawiya d’où j’ai tenté la traversée (…)
J’ai voyagé en mer pendant plus de deux jours, mais les garde-côtes libyens nous ont arrêté et ramené à terre où j’ai été emprisonné en centre de détention, d’abord à Tripoli puis à Dahr Al Djebel.
Je suis parti de chez moi en 2015, ces cinq dernières années je n’ai connu quasiment que la captivité (que ce soit aux mains des trafiquants ou dans les centres de détention officiels). Où est le HCR ? Qu’en est-il des droits de l’Homme ? Ici dans le centre de détention de Dahr Al Djebel, avant que MSF intervienne, j’ai vu une vingtaine de personnes mourir à cause de la maladie, mais qui s’en soucie ? Enfermés, nous mourrons à petit feu, si le HCR ne peut ou ne veux rien faire pour nous, qu’il nous le dise ! »
Février 2020

E.T.

« J’ai quitté l’Érythrée en mars 2015, d’abord pour le Soudan ou j’ai séjourné un peu plus d’un an, puis je suis parti pour la Libye. J'y suis rentré par Al-Koufrah avant de continuer sur Bani Walid où les trafiquants m’ont arrêté. J’ai été emprisonné pendant plus d’un an. J’ai même tenté, un jour, de m’échapper, mais j’ai été recapturé. Pour me punir, ils m’ont enfermé dans un container clos, en plein soleil, pendant un mois… Finalement (avec ma rançon payée), j’ai réussi à rejoindre la côte, mais avec les combats entre milices faisant rage, en octobre 2017 j’ai été arrêté et envoyé en centre de détention. J’ai séjourné dans quatre centres de détention en y incluant celui-ci. En février 2019, j’ai été interviewé avec huit de mes codétenus par le HCR. Quelques mois plus tard, six ont été évacués. Jusqu’à présent, je n’ai reçu aucun retour du HCR.
Nous sommes tous ici des demandeurs d’asile; alors pourquoi le HCR ne s’occupe pas plus de nous ? Pourquoi ne viennent-ils pas plus souvent ici ? Le HCR, du moins ses employés qui sont venus ici, nous ont promis tellement de choses, mais fait si peu… »
Février 2020

S.M.

« Je suis parti d’Erythrée en mai 2015 pour le Soudan. J’y suis resté un peu plus d’un an avant de reprendre la route pour la Libye. A Bani Walid je me suis retrouvé emprisonné par un trafiquant pendant environ un an. Ma famille restée en Érythrée n’a eu d’autres choix que de vendre la maison pour payer ma rançon.
En mars 2017, j’ai été relâché et j’ai rejoint la côte. J’ai attendu quatre mois avant de tenter la traversée. En pleine mer après une douzaine d’heures de navigation, un bateau libyen nous a intercepté. Ils nous ont sommés de nous arrêter en tirant devant le bateau. Finalement et face à notre refus de retourner en Libye, ils ont tiré sur notre zodiac pour le couler. Nous n’avons eu d’autres choix que de monter à bord. À terre, nous avons été transférés au centre de détention de Tariq-al-Matar puis avec les lignes de front qui se rapprochaient, nous avons été transférés au centre de détention de Dahr Al Djebel.
Nous avons besoin d’aide, La Libye est comme l’enfer pour nous…  J’ai 49 ans je suis fatigué et bien trop vieux pour dire quoi que ce soit ! »
Février 2020

D.A.

« J’ai fui l’Érythrée en 2017, je suis passé par l’Éthiopie, puis le Soudan et enfin la Libye. J’ai attendu quatre mois dans la ville côtière de Sabratha pour tenter la traversée, mais malheureusement les passeurs/trafiquants nous ont renvoyé à Benghazi où nous avons été emprisonnés. Le HCR est intervenu et nous a enregistré en tant que réfugié avant de nous évacuer par avion. Je pensais aller au Niger, mais je me suis retrouvé emprisonné à Tripoli dans le centre de détention de Tariq-al-Siqa avant d’être transféré à Tariq-al-Matar… Pour finalement être transféré ici, au centre de détention de Dahr Al Djebel…
Qui est là pour nous entendre et surtout répondre à nos besoins ? Que fait le HCR ? Le seul espoir qui nous reste est porté par MSF. Mais dans ces conditions, que peut faire MSF pour nous ? Y a-t-il vraiment un espoir pour nous ? »
Février 2020

T.T.

« Début 2017, j’ai rejoint la Libye.  En route pour le bord de mer, j’ai été capturé par une milice qui m’a enfermé. Pendant plusieurs mois j’ai été torturé tous les jours jusqu’à ce que ma famille paye la rançon. En septembre 2017, j’ai rejoint la ville côtière de Sabratha, mais malheureusement la ville était ravagée par les combats entre milices.
Avec beaucoup d’autres migrants, nous avons été arrêtés et envoyés dans un centre de détention à Gharyan. Là, nous fûmes enfermés pendant 7 mois avec quasiment rien à manger et sans voir la lumière du jour. J’ai vu tant de personnes mourir, j’ai perdu tant d’amis…
Un jour, le centre de détention a été attaqué par les trafiquants. Ils ont emmené de force des dizaines et des dizaines de personnes. Ensuite, j’ai été transféré dans d’autres centres de détention pour finalement arriver, en septembre 2018, dans celui de Dahr Al Djebel. Là, les neuf premiers mois ont été terribles, nous étions tous entassés 24 heures par jour dans un grand hangar (plus de 500 personnes dans un hangar de quelques 1 500 m²). 23 personnes sont mortes, majoritairement à cause de la tuberculose… »
Février 2020

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