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Urban Survivors

Mathare/Nairobi - Kenya (2010)

Personne ne choisi d’échouer ou de naître ici. Ceux avec qui je suis devenu familier ne se nomment-ils pas eux-mêmes "Survivors"? Dans le plus complet dénuement d’une population ignorée de la "réussite" économique de son pays natal, le futur, l’avenir n’est pas de mise. Ce qui certes n’exclut pas le rêve mais le seul rêve possible en l’occurrence est celui d’être ailleurs; or cette perspective n’est pas offerte. Pas de perspectives, pas d’avenir, pas d’espoir. Les journées sont longues dans le ghetto, même si le temps n’a pas la consistance qu’il peut prendre ailleurs. Dès lors que la naissance est déjà une chute, comment se lever ? C’est ainsi qu’au cœur de la vie dans le Slum on voit passer tant d’ombres, des ombres bien vivantes pourtant mais l’impression est que le soleil ici n’est pas celui des autres.
Qu’est-ce donc que survivre alors? Il faut bien se nourrir, dormir, aimer...
Pour bien de ces Survivors, les plus jeunes d’entre eux particulièrement, l’anesthésie constitue un viatique dont les deux piliers sont une herbe très forte et l’alcool produit clandestinement sur place: le Shangaa.
Les deux produits sont par ailleurs une source de revenus pour certains, le travail n’existant pas vraiment. Aussi est-il courant de voir des hommes vaincus par leur consommation, gisant à même le sol, n’importe où, là où ils sont tombés, enfin ailleurs mais jamais pour bien longtemps.
Le Shangaa est fabriqué dans d’anciens bidons ayant contenu des produits chimiques divers, c’est un alcool très fort dont les effets sont immédiats. Il est cause de cécité, de traumas nerveux, de comas. Il s’agit d’un produit fréquemment coupé avec du kérosène, de l’engrais ou de l’acide de batterie. Cet alcool frelaté n’a rien à envier au canned Heat des pauvres de l’Amérique ni aux breuvages absorbés par les enrôlés de l’armée russe envoyés en Tchétchénie.
Survivre c’est aussi être constamment sous pression, n’avoir aucun choix.
Alors les vies se consument. Car la vie n’est pas moins présente qu’ailleurs, c’est juste un jeu perdant. Des baraques, de la taule, des ruelles encombrées de gisants vivants, défoncés pour beaucoup. Et les mères continuent d’élever leurs enfants avec ce qu’elles ont. Elles font les lessives préparent à manger…

Photos extraites du reportage complet
Ilford HP5 Plus, Film 135 '24x36' - Focale 20mm

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